Comment peut-on assurer la pérennité des projets lors d’un renouvellement de gouvernance associative ou départ d’un·e fondateur·trice ?

Transmettre et pérenniser un projet

Cette table ronde était animée par Nathalie Redant, directrice des richesses humaines à CO.

Dans les associations culturelles, le renouvellement de gouvernance ou le départ de membres fondateurs marquent une étape très importante. Comment se préparer pour continuer à écrire une histoire commune avec un nouvel avenir ?

« Une association culturelle est un organisme vivant, qui naît, qui grandit et qui est appelé à mourir, sauf si une transmission s’opère, si un souffle nouveau est donné assez tôt. » Cette belle évocation du comédien Jean-Jacques Faure résume bien les enjeux de la transmission. Fondateur à La Rochelle de la Compagnie Avis de Tempête, il a eu l’idée de croiser le théâtre avec les arts du cirque. En 2012, l’une de ses filles, Louise, elle-même artiste de cirque professionnelle, a repris la compagnie qu’elle dirige aujourd’hui. Jean-Jacques Faure se souvient des réactions étonnées qu’a pu susciter cette démarche : « Des gens m’ont demandé ce qui pouvait être transmis à part les ordinateurs ! Une compagnie théâtrale représente pourtant un patrimoine immatériel énorme et le matériel est très secondaire par rapport aux héritages artistiques. »

DES VALEURS EN PARTAGE

Du spectacle vivant à la défense des cultures de l’oralité, les problématiques se retrouvent. Association historique de Poitou-Charentes, l’UPCP-Métive (1) fête ses cinquante ans en 2019. Active sur cinq départements, elle fédère de nombreuses associations locales, gère un festival et des ressources autour des cultures régionales : histoire, chants, danses, langues… Au fil du temps, la question du renouvellement s’est souvent posée, de façon plus accrue avec les départs à la retraite des membres fondateurs. « L’essentiel est de transmettre des valeurs », souligne son président Jean-François Miniot. « Nous avons toujours travaillé sur la valorisation du patrimoine culturel, le droit à l’expression pour tous et l’éducation populaire… C’est aussi la passion que nous transmettons ! »

LE FAIRE ET LE SYMBOLIQUE

L’enjeu est également de capitaliser sur les compétences acquises, les métiers développés, ainsi que le rappelle Josette Renaud, directrice de l’UPCP-Métive : « L’histoire et le “faire” de l’association
doivent se transmettre en transversalité permanente, pour porter le projet dans sa globalité. » Ces enjeux de passation de témoin se retrouvent chez d’autres acteurs culturels. Ainsi, La librairie associative Le Texte Libre a été fondée à Cognac en 1974. Employant deux salariés, elle est aussi animée depuis les débuts par le militantisme de ses adhérents. « Le symbolique occupe un poids très fort », reconnaît Martine Plainfossé, administratrice de l’association. « Les fondateurs peuvent être très attachés à leur projet et laisser difficilement la place à d’autres, ce qui peut créer des problèmes. » L’enjeu repose souvent sur la génération qui prend le relais juste après les fondateurs… Quelle méthode adopter ? Comment rassurer les partenaires institutionnels ?

ANTICIPER !

Il est donc très important de préparer ces transmissions. Le comédien Jean-Jacques Faure a d’abord travaillé plusieurs années avec sa fille, puis elle a eu envie « d’écrire sa propre histoire », tout en gardant le nom de la compagnie de son père et son image positive. « Les attentes peuvent être différentes selon les partenaires », précise Josette Renaud de l’UPCP-Métive. « Pour préparer cette nouvelle évolution, nous travaillons depuis un an avec les salariés, les membres du bureau et un comité de suivi réunit les institutions qui nous soutiennent. »

Véritable cheminement, la transmission prend du temps et cette période est l’occasion de réinterroger le projet associatif. Certaines structures ont sollicité un Dispositif local d’accompagnement (DLA), à l’image de la librairie Le Temps Libre, comme l’indique Martine Plainfossé. « L’intérêt immédiat d’un DLA ne se voit pas toujours mais il nous a permis de faire une autocritique. On ne disait jamais que la librairie est associative par peur de renvoyer une image d’amateurisme. Maintenant, nous le valorisons et cela permet de sensibiliser les gens à notre métier, à la vie d’une librairie… »

INVENTER SA TRANSMISSION

Un dénominateur commun à ces histoires est aussi le territoire. « Il y a une osmose indéniable avec le projet associatif, souligne Jean-Jacques Faure, même pour un chapiteau de cirque comme le nôtre car sa vocation est d’aller à la rencontre des gens. » De la même façon, l’UPCP-Métive a trouvé dans la région Nouvelle-Aquitaine un espace plus vaste où partager son savoir-faire en matière de valorisation des langues, rejoignant les préoccupations des Basques et des Occitans. « La transmission est une chaîne infinie et nous en sommes tous un maillon », conclut Josette Renaud. À chaque association d’inventer la sienne en fonction de la singularité de son projet… tout en s’appuyant sur l’expérience des autres !

1. Union pour la culture populaire en Poitou-Charentes et Vendée.

Pour aller plus loin

Benoît Hermet

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