Transformation, évolution du projet associatif… le chemin vers la société coopérative

Les nouveaux modèles coopératifs

La majorité des structures artistiques et culturelles fonctionne avec le statut d’association. Aujourd’hui, pour répondre à des contextes nouveaux, certaines font le choix d’évoluer vers des modèles coopératifs comme les SCOP. Décryptage et témoignages pour comprendre.

Cette table ronde était animée par Baptiste Cantinolle, délégué régional de l’URSCOP.

Historiquement, les Sociétés coopératives et participatives (SCOP) découlent des associations ouvrières qui défendaient au XIX e siècle leurs droits et leur autonomie. Cette forme d’entreprise coopérative, rejointe par les Sociétés coopératives d’intérêt collectif (SCIC) (1) , est encore peu développée dans le monde associatif où elle ne représente que 10% (sur les 12% d’associations employeuses en France). Pourtant, nombre de structures du milieu artistique et culturel constatent les limites du statut associatif au développement de leur projet.

COMMENT ÇA MARCHE ?

Au même titre que les sociétés traditionnelles (SARL, les SAS, les SA…), les SCOP et SCIC relèvent du Code du Commerce et fonctionnent dans les règles de l’économie classique.
La particularité des SCOP est de placer les salariés au cœur de l’entreprise. Ils sont les associés majoritaires d’un projet commun mutualisant de façon équitable les risques et les décisions stratégiques.
Une personne est égale à une voix en Assemblée Générale (même pour le dirigeant) et les bénéfices sont redistribués équitablement, avec une part réservée à la pérennité de l’entreprise.
Sur le même principe, les SCIC ont une dimension d’utilité collective répondant aux besoins d’un territoire ou d’une filière. Elles se caractérisent également par la possibilité d’intégrer plusieurs parties-prenantes à leur gouvernance : salariés, clients, fournisseurs, collectivités…
Le réseau régional des URSCOP accompagne les structures et dispose d’outils pour mobiliser les financements. L’URSCOP peut intervenir depuis l’étude du projet coopératif jusqu’aux modalités de transformation (rédaction des statuts, AG…).

DES CLOWNS EN SCOP

Compagnie niortaise créée en 1978, Les Matapeste ont amené l’art du clown sur les scènes de théâtre. Fondée par deux passionnés, l’association s’est développée à travers de nombreux projets et emploie
aujourd’hui plusieurs salariés. L’évolution vers un autre statut avait pour but de libérer les adhérents bénévoles d’une responsabilité financière et d’impliquer les salariés animant le projet au quotidien. La transformation a muri longuement, le passage en SCOP n’étant pas sans risques. Les deux fondateurs ont abandonné leur intermittence, incompatible avec le sociétariat. L’un est devenu gérant, l’autre salarié, en gardant le principe de réinvestir les bénéfices dans le projet, au même titre qu’une association. En revanche, l’organisation en entreprise coopérative a permis aux Matapeste de mieux résister à la baisse de financements publics. « En SCOP, on est beaucoup plus solidaires des décisions qu’en association », souligne Valérie Zerbib, chargée de diffusion de la compagnie.

DEUX STATUTS AU SERVICE DE LA BD

Basées à Poitiers, les éditions FLBLB étaient à l’origine un groupe d’étudiants passionnés de BD. Dessinateurs-auteurs, ils ont ensuite créé une maison d’édition pour diffuser leurs ouvrages et ceux des autres. Le statut associatif est devenu moins évident avec le salariat et la vente de livres. La fin des emplois aidés a déclenché une évolution en deux structures :

  • une association pour la partie création, plus fragile, qui peut être aidée financièrement ;
  • une SCOP pour gérer la vente de livres (avec un diffuseur), les stocks, la fiscalité… « Nous sommes très contents de la liberté qu’offre la SCOP, explique Grégory Jarry, auteur et cofondateur des éditions FLBLB. Nous avons créé notre outil de travail avec une gouvernance de gauche ! Les salaires sont les mêmes et le maximum du capital est réinvesti dans le projet. »

UNE COOPÉRATIVE POUR LE SPECTACLE VIVANT

Cristal Production est un collectif installé à La Rochelle qui accompagne les artistes du spectacle vivant à produire leur travail et à le diffuser. Après vingt ans en association, Cristal Production a choisi en 2012 le statut de SCIC. Salariés, artistes, collectivités, organisateurs sont impliqués dans un système de gouvernance partagée. Cristal Production a aussi diversifié ses ressources en proposant de la formation aux professionnels ou de l’événementiel… « Ce changement a été une vraie étape pour repenser le projet, tout en conservant notre ADN qui est l’esprit de coopération », rappelle Laurence Guinot, administratrice. « Être en coopérative ne règle pas tous les problèmes mais son mode de gouvernance exigeant donne une perception stable à nos partenaires. Pour les salariés, devenus associés, c’est un engagement qui change ses pratiques de travail et qui peut être enthousiasmant. » Cristal Production a été accompagné sur ce changement par l’URSCOP de Poitou-Charentes avec un financement DLA (2) .

1. Il existe également des CAE (Coopérative d’activité et d’emploi) qui regroupent des entrepreneurs-salariés mutualisant leurs compétences.
2. Dispositif local d’accompagnement. Le DLA accompagne les structures d’utilité sociale employeuses, dans leur projet de création et de consolidation d’emplois.

Pour aller plus loin

Benoît Hermet

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